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FRONTIÈRE ET TRANSITION

L’échange est non seulement naturel, c’est la base de toute communauté humaine. Au sein de la communauté, l’échange n’a pas besoin de contrepartie. Chacun déploie les efforts nécessaires, en fonction de ses capacités et des besoins de la communauté. (Comme disait Louis Blanc : « de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ! »)

Mais alors, pourquoi un moyen d’échange basé sur la valeur ?
C’est une question sacrément pertinente ça !

Voici le problème : comment peut-on, en recrutant parmi des humains obligés de se vendre sur le marché pour vivre, espérer créer une communauté où les membres donnent sans compter ? Toute personne qui a déjà tenté l’expérience le sait : ceux et celles qui donnent finiront, à plus ou moins long terme (selon leur endurance), par être épuisés par ceux et celles qui prennent sans donner.

Le moyen d’échange permet de protéger les membres de ce type de déséquilibre inévitable dans un groupe à cheval entre l’échange communautaire et l’échange basé sur l’aliénation du travail salarié (et/ou des aides de l’État).

Un moyen d’échange (tel que le loco) écarte d’emblée les abuseurs et permet de ne conserver que ceux-là et celles-là qui ont effectivement quelque chose à offrir. Il agit comme un instrument de transition entre le marché dit « libre », qui favorise l’accaparement au détriment des autres, et le « marché » communautaire, qui cherche plutôt à répondre à des besoins collectifs. Dans l’immédiat, ça permet d’établir une frontière entre ce qui fait partie de la communauté et ce qui lui est extérieur.

L’objectif du loco est de recréer progressivement les conditions d’une communauté humaine — en plein milieu d’un système inhumain. Et pour y arriver, il faudra bien prendre garde que notre moyen d’échange communautaire ne devienne pas un simple équivalent de l’argent : on s’assurera de compliquer un peu la conversion d’un en l’autre, de sorte à ce que le moyen d’échange communautaire ait toujours plus de valeur pour les membres actifs qu’il ne pourrait éventuellement en avoir pour les autres. Cela est absolument essentiel pour maintenir la cohésion de la communauté, pour éviter sa dissolution dans le solvant aliénatoire de l’échange monétaire.

(Référence : 20231201. Texte complet : https://nuee.cc/s/20231201-frontiere-et-transition.)